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La politique monétaire actuelle : les effets

Actuellement les banques paient un taux négatif de – 0,4 % quand ils placent de l’argent auprès de la Banque Centrale, même pour des périodes très courtes. D’autre part, la BCE a augmenté le volume de son programme d’achat d’obligations diverses de 60 à 80 milliards d’euros. Finalement, elle a fixé le taux directeur à 0 %.

En raison du taux d’intérêt de la facilité de dépôts de – 0,4 %, les banques européennes ont commencé à refacturer en quelque sorte à certains de leurs clients le taux qu’elles paient à la Banque Centrale pour le placement auprès d’elle des avoirs leurs confiés par ces clients. Au Luxembourg, de même d’ailleurs que dans la plupart des autres pays de l’Union Européenne, les banques se limitent à mettre le taux négatif à charge des entreprises ou investisseurs professionnels, à partir d’un certain montant. Les clients particuliers sont pour l’instant épargnés, pour des raisons commerciales sans doute, mais aussi parce qu’en général les épargnes qu’ils confient aux banques sont de loin inférieures aux sommes parquées par les professionnels.

L’ULC demande aux banques luxembourgeoises de ne pas punir les clients privés qui leur confient leurs épargnes, en vue de leur retraite notamment, au motif du taux d’intérêt de dépôt négatif leur demandé par la Banque Centrale.

Toutefois, les banques demandent à leurs clients privés des frais et commissions de toute nature, qui dans un rythme presque annuel sont revus à la hausse. En ce qui concerne ces frais, il existe une certaine concurrence entre les banques, mais il est un fait que le client luxembourgeois typique change rarement l’institut financier.

Pourquoi d’ailleurs la Banque Centrale Européenne pratique-t-elle cette politique monétaire ? Elle s’explique en raison du fait qu’elle veut pousser les banques nationales à prêter de l’argent aux entreprises et ces dernières à investir en empruntant. Or, les entreprises ne le font pas parce qu’elles estiment que les perspectives de profit dans la situation économique actuelle sont sérieusement compromises. En effet, la crise de 2008 a substantiellement dévalué les actifs des entreprises qui d’ores et déjà ont d’énormes dettes à rembourser, au niveau européen du moins. D’où une nette préférence pour le désendettement progressif plutôt que la prise de nouveaux risques en recourant au crédit. Cette attitude est caractéristique d’une tendance déflationniste. La zone euro est globalement en phase de désendettement. La faiblesse de crédit résulte d’une faiblesse de la demande qui elle s’explique en raison de la réticence des entreprises à investir, dans le contexte économique actuel. C’est la récession par les bilans.

Mais il existe un autre danger, à savoir la surévaluation des actifs financiers dont la valeur est portée précisément par la politique monétaire actuelle. Le risque d’une sérieuse correction de valeur sur les actifs en bourse est donc réel et les investisseurs professionnels et privés risquent d’en souffrir.

La politique monétaire actuelle comporte toutefois un substantiel avantage pour les consommateurs privés, à savoir la possibilité d’emprunter de l’argent à un taux d’intérêt historiquement bas. Considérant que de moins en moins de jeunes ménages disposent des moyens financiers pour acquérir un immeuble, ceci devrait aider à redresser partiellement la situation. Dans ce contexte, je signale qu’un projet de loi sur le crédit responsable vient d’être avisé par l’ULC, qui espère qu’en raison de la transposition de cette nouvelle directive européenne, les demandeurs d’emprunts ne vont pas être renvoyés en raison d’une attitude de prudence exagérée des banques.

Guy Goedert

Administrateur - Chargé de direction

07/09/2016