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Déflation? (12/08)

Déflation : le mot est à la mode. La déflation est une baisse générale et durable des prix à la consommation, dans tous les secteurs. Ne s’agit-il pas d’une bonne nouvelle après que le pouvoir d’achat des consommateurs ait été mis à mal pendant de longs mois? En apparence seulement. D’un point de vue économique, la déflation peut avoir des conséquences graves.
Assiste-t-on donc à un revirement de la situation économique ? Après des mois d’une inflation galopante, une flambée des prix du pétrole et des produits alimentaires, au point que la Banque Centrale Européenne a encore remonté son taux d’intérêt directeur en début d’année, la crise inflationniste semble à présent passée. Le prix du baril de pétrole est redescendu de son record historique de 150 $ à un tiers seulement.
Les actifs financiers ont chuté de 50 % suite à la très nette régression des valeurs aux bourses mondiales. Le marché immobilier sera à son tour atteint avec des baisses de prix en prévision variant entre 5 et 15 % dans l’Union Européenne, selon le pays-membre. L’indice des prix à la consommation est en recul.
Tout le monde a compris les dangers d’une forte inflation : augmentation sensible des prix à la consommation, crédit facile, surévaluation des actifs financiers, formation de bulles financières. L’éclatement conjoint de la bulle de crédit et de la bulle immobilière, les deux étant liées entre-elles, a déclenché la crise financière que nous traversons, crise qui a atteint l’économie réelle : le monde est au seuil de la récession économique, respectivement vient d’y entrer, selon le pays. Pourquoi craindre une déflation qui se manifeste par une baisse
des prix ? La déflation ne devient problématique que si les chutes de prix se prolongent durant une longue période. Pour le consommateur, ceci ressemble à un soulagement et c’en est un, à court terme. Tout devient moins cher, ce qui fait toujours du bien au portefeuille. Or, une spirale de baisses continues risque de mettre en péril l’économie mondiale. En effet, les consommateurs vont commencer à reporter leurs achats, car à quoi bon d’acquérir un bien de consommation qui sera encore moins cher dans le futur. La consommation s’en trouve
donc freinée. Les entreprises à leur tour freinent leurs investissements car leurs rendements s’amenuisent, alors que leurs marges sont déjà en baisse. Par la suite, dans une logique de réduction de coûts, les entreprises vont commencer à diminuer leurs effectifs ce qui entraîne une hausse du chômage. En même temps, les salaires stagnent. Dans une deuxième phase donc, le pouvoir d’achat diminue et freine une nouvelle fois la consommation.
Mais peut-on déjà parler de déflation à l’heure actuelle ? La réponse est non. Nous sommes en présence non pas d’une déflation, mais d’une inflation que l’on appelle rampante ou encore désinflation. L’augmentation des prix est donc juste plus modérée. Le consommateur ne doit pas s’inquiéter pour le moment alors que la crainte d’une déflation ne touche pour l’instant que le monde boursier. Ne mélangeons donc pas les notions de récession économique et de déflation qui elle ne s’est pas encore transmise à l’économique réelle.
Et si cela arrivait, quoi faire ? Il n’y a pas de recette miracle. Le marché laissé à lui seul ne peut s’autoréguler. Beaucoup dépend dans une telle situation de la qualité des politiques budgétaires mises en oeuvre pour alimenter le système financier : bonne politique monétaire qui permet aux banques de distribuer des liquidités sans difficulté, avec des taux d’intérêts revus à la baisse. Aussi, mesures fiscales appropriées pour relancer la consommation. Finalement, tout dépend des consommateurs.
Toutefois, agir selon le modèle keynésien qui voit la raison de la crise déflationniste dans l’effondrement de la demande globale, ne dispense pas d’aller voir du côté de l’offre. Certes, l’idée de tout faire pour relancer la consommation non seulement séduit du point de vue macro-économique, non seulement plait à tout le monde, mais s’impose tout simplement dans une telle situation. D’un autre côté, la santé de l’économie
dépend aussi du dynamisme des entreprises, de leur rentabilité et de leur adaptation permanente au marché. Il faut agir sur les deux plans.

Guy Goedert
Administrateur-Chargé de direction

09/12/2008