COVID 19 – EFFETS DE LA FORCE MAJEURE SUR LES CONTRATS CONCLUS


La Commission Européenne a publié en anglais des lignes directrices concernant, d’une part, les voyages à forfait et, d’autre part, les droits des passagers aériens, ferroviaires, maritimes, de bus. Le principe commun : les voyageurs peuvent insister sur le remboursement intégral (sans obtenir de dédommagement supplémentaire) en cas d’annulation par l’organisateur ou le transporteur. Compte tenu du fait que tout le monde souffre, la Commission invite les consommateurs d’accepter des notes de crédit (vouchers) mais, en droit, ils peuvent insister sur l’annulation et le remboursement.

L'ULC invite également les consommateurs à se montrer flexibles dans la mesure du possible : nous vous invitons à négocier le report de votre voyage, au même prix, si possible, sinon à demander un bon de voyages valable pour une durée minimale de 18 mois. Si pour des raisons personnelles particulières, vous ne serez pas en mesure de reporter votre voyage dans le délai proposé, nous vous invitons à faire part de ces raisons à votre organisateur de voyage afin de faire valoir l'application des règles actuellement en vigueur.

Notez que les Etats membres sont susceptibles d'adapter leurs règles nationales dans ce domaine. C'est le cas actuellement en Belgique ( lien vers arrêté ministériel belge).

Les réglementations européennes sur les droits des passagers[1] ne règlent pas le cas où l’annulation est effectuée à l’initiative du consommateur alors que le transporteur opère toujours les services, c-à-d n’a pas pris lui-même la décision d’arrêter les opérations vers telles ou telles destinations ou n’y a pas été obligé par les autorités nationales. 

Pour savoir si le consommateur peut invoquer l’annulation et le remboursement des acomptes/prix convenus dans ce cas ainsi que pour d’autres contrats comme les locations ou réservations individuelles, il n’existe, hélas, pas de réponse européenne harmonisée. Il faut se référer à chaque droit commun national, notamment aux règles régissant la force majeure ou le « Wegfall der Geschäftsgrundlage »[2] en droit allemand et autrichien. 

Même s’il existe des différences nationales, notamment de jurisprudence, et que nous ne pouvons donner certaines orientations générales que sous réserve, les effets contractuels du Covid 19 - indiscutablement un cas de force majeure pour l’Europe, le Nord de l’Amérique, la Chine, …- peuvent se résumer comme suit en partant du droit français : 

« il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur. Si l’empêchement est temporaire, l’exécution de l’obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l’empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations.»   

En l’occurrence, le consommateur s’engage à payer un certain montant en contrepartie d’une prestation (voyage, location d’une chambre, d’une voiture, participation à un évément culturel, sportif,…) par un professionnel/non professionnel. Or, même si ces prestations restent accessibles, de moins en moins d’ailleurs, le consommateur ne pourra en bénéficier parce que les frontières se ferment et que les risques de santé personnelle et publique s’y opposent. De plus en plus d’autorités invitent les citoyens voire leur imposent de rester chez eux. L’objet du contrat, à savoir des droits et obligations réciproques, devient caduc et l’annulation s’impose, sauf si l’exécution pourra se faire ultérieurement à une date qui convient aux deux parties.

Avec la pandémie nous sommes arrivés à un point, où les annulations des professionnels mais aussi des consommateurs, de leur propre initiative, deviennent de plus en plus inéluctables avec comme conséquence le droit au remboursement des sommes versées ou dues au professionnel. L’acceptation des annulations des consommateurs ne doit plus être qualifiée de geste de bonne volonté d’une compagnie aérienne, d’un hôtel, de tout autre prestataire. Accepter volontairement des notes de crédit (vouchers) ou de nouvelles dates de réservation (mais pour quand ?), aidera les professionnels qui sont eux aussi dans la tourmente. 

Attention cependant aux sommes payées pour des prestations ultérieures car les risques de faillites dues à ou accélérées par la crise se multiplient. 

Howald, le 23 mars 2020    


[1] La directive européenne sur les voyages à forfait prévoit des règles sur les annulations par les consommateurs dont des événements de force majeure dans les pays de destination.

[2] Wegfall der Geschäftsgrundlage bedeutet, dass der typische Vertragszweck hinfällig geworden ist. Kostenfreie Stornierung ist dann möglich, wenn die Reise für den Reisenden mit unzumutbaren Risiken verbunden ist ; das hängt von den konkreten Umständen ab.