Garantie légale des biens de consommation – Progrès en vue


A compter du 18 mars de cette année tout consommateur achetant un bien tangible en France, y compris en ligne p.ex. sur www.amazon.fr , sera mieux protégé : pendant les 2 années que dure la garantie légale, tout défaut de conformité (défectuosité…) est présumé avoir existé au moment de la livraison signifiant que le vendeur doit prouver que le défaut est dû à un mauvais usage par le consommateur. La France1 innove ainsi en suivant l’exemple du Portugal en éliminant une source de discorde récurrente du droit européen : « Sauf preuve contraire, les défauts de conformité qui apparaissent dans un délai de six mois à partir de la délivrance du bien sont présumés exister au moment de la délivrance » 2. En clair, après les premiers 6 mois, le vendeur peut exiger que c’est au consommateur de démontrer que le défaut est inhérent au produit ce qui s’avère presque toujours comme une charge coûteuse voire impossible. Autre bonne nouvelle, la Commission Européenne suit les exemples français et portugais en proposant qu’il « est nécessaire d’harmoniser totalement le délai pendant lequel la charge de la preuve du défaut de conformité est renversée en faveur du consommateur. Au cours des deux premières années, le consommateur devrait uniquement établir que le bien n’est pas conforme, sans qu’il soit nécessaire de prouver que le défaut existait réellement au moment de la délivrance ». Pour le moment cette proposition est limitée aux seuls contrats de ventes en ligne et de toute autre vente à distance de biens. L’adoption des nouvelles règles européennes en matière de garantie devrait, hélas, prendre de nouveau pas mal de temps.

Tout le monde s’accorde à dire qu’il faut les mêmes règles pour tous les canaux de distribution sans distinction entre vente en ligne/à distance et vente en magasin. Puis, il sera de nouveau difficile de trouver un accord sur le niveau d’harmonisation totale privant les Etats membres de maintenir ou d’introduire des règles plus protectrices des consommateurs. Compte tenu que nos consommateurs achètent activement à l’étranger comme confirmé dans une récente étude du STATEC3, nous sommes favorables à une harmonisation de haut niveau des règles de protection des consommateurs, car nos consommateurs achètent essentiellement de leur propre initiative sur des sites non établis, et tombent ainsi sous les réglementations des pays d’origine des vendeurs. Plus il subsiste des différences entre règles nationales, plus nos consommateurs sont exposés à des insécurités juridiques. Selon le STATEC, les difficultés à trouver des informations sur les garanties et droits légaux figurent parmi les principales sources de plaintes des consommateurs achetant en ligne. L’ULC n’a donc pas tardé à adopter son Avis sur la nouvelle proposition de directive communautaire en signalant son soutien de principe tout en proposant quelques amendements répondant à des critiques justifiées émises non seulement par d’autres associations de consommateurs mais encore certains Etats et au sein du Parlement Européen. L’un des principaux griefs concerne la proposition de limiter partout en Europe la garantie légale à deux ans alors que de nombreuses législations vont plus loin, y compris la nôtre. En effet, même si le Code de la consommation prévoit une garantie de deux ans, il permet toujours d’invoquer la disposition des vices cachés du Code civil qui n’est pas limitée dans le temps mais doit être invoquée dans un bref délai après la découverte du vice. Cette garantie peut s’avérer utile notamment pour des biens de longue durée comme les voitures, les chaudières ou autres immeubles par destination. Nous nous étonnons que la Commission ne propose que deux ans alors que sa proposition précise que « Il est important de garantir une plus longue durabilité des biens de consommation pour parvenir à des modes de consommation plus durables et à une économie circulaire… ». L’ULC espère que le Parlement Européen tiendra compte de notre amendement, à savoir que « Le consommateur a droit à un dédommagement pour non-conformité avec le contrat si le défaut de conformité apparaît dans un délai de deux ans à compter du moment pertinent pour déterminer la conformité, sauf si la durée de vie du bien auquel le consommateur peut s’attendre est plus longue… ». Cette réserve permettrait au consommateur d’invoquer toute déclaration précontractuelle d’un vendeur individuel ou de filières de vendeurs qui s’engagent volontairement à allonger la durée de vie de leurs produits (allégations environnementales)4.

Cet amendement serait aussi cohérent avec la législation Eco-design imposant des normes de durabilité obligatoire pour des produits déterminés. Le Règlement (UE) N° 666/2013 concernant les exigences d’éco-conception applicables aux aspirateurs en fournit un cas d’application5. Leur mise sur le marché requiert à partir du 1 septembre 2017 une durée de vie utile minimum du moteur et du flexible. Dans la mesure où ces durées de vie sont supérieures à deux ans, le consommateur devra être en droit d’invoquer la non-conformité de ces aspirateurs pendant toute la durée de vie légalement imposée comme un minimum pour être commercialisés.

1 Art. L.211-7 du Code de la consommation français

2 Art. L.212-6 du Code de la consommation luxembourgeois

3 Regards sur la pratique du commerce électronique par les particuliers (février 2016) :
88% des résidents luxembourgeois ont acheté en ligne auprès de vendeurs situés dans un autre pays européen, 28% auprès de vendeurs nationaux et 24% auprès de vendeurs situés en dehors de l’Europe

4 Cf. à titre d’illustration la loi française n° 2015-992 relative à la transition énergétique pour la croissance verte

5 Journal Officiel de l’UE L 192 du 13.7.2013